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 Nothing wrong with me, nothing wrong with me

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AuteurMessage
Kyle

Kyle


Messages : 122
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MessageSujet: Nothing wrong with me, nothing wrong with me   Nothing wrong with me, nothing wrong with me Icon_minitimeSam 12 Jan 2013 - 21:35

Spoiler:


Le plancher du ring était écarlate et lorsqu'il se pencha pour cracher au sol, son sang s'y éclaboussa en un arabesque à peine visible.

-

D'énormes projecteurs diffusaient une lumière vive sur le ring, plongeant les vieilles estrades de bois dans une noirceur poisseuse. La foule spectatrice lui apparaissait comme une horde de hyènes cachées dans l'ombre, leurs grandes gueules ouvertes sur des crocs luisants et des cris affamés. Le ring était une poêle à frire et eux, la bouffe qui n'attendait que de se faire rougir.

-

Il ne savait pas se battre à proprement parler, il était ce qu'on pouvait appeler un "naturel". Les vieux édentés employaient le terme lorsque leurs hideux visages se déformaient en un sourire satisfait, au moment où il remportait une victoire sur laquelle ils avaient parié gros. Leurs mains se refermaient alors sur ses épaules et une odeur de cigarettes et d'alcool, parfois de cuir ou de Cologne, lui emplissait le nez et il souriait d'un air acéré pour résister à l'envie de leur casser les doigts. Le ring n'accepterait pas de perdre de précieux clients.
(Et il n'accepterait pas de perdre sa place dans le ring.)

-

Si Dieu existait réellement, il n'avait mis au monde qu'une seule perfection: la mort.

C'était un fait indéniable qu'une chose qui marquait le début et la fin, qui constituait en soi-même le tout d'un cycle et qui n'avait besoin de rien d'autre pour s'accomplir présentait les traces d'une perfection absolue.

Il n'y avait que dans la mort que chacun retrouvait son image la plus parfaite. Effritée, flétrie, décomposée, cette finalité ultime était la seule réelle beauté de ce monde.

De ce fait, le corps humain en ses derniers instants était comme la plus magnifique des sculptures du Créateur et de ses créatures.

-

Il n'avait vu que trois cadavres d'hommes au cours de son existence.
Trois corps, la peau lisse et raide, les membres éternellement figés en abandon, la bouche entrouverte sur un dernier souffle et les yeux ouverts sur le néant.
Avec ces trois morts, il pouvait mettre bout à bout un spectacle grandiose, un symbolisme patenté à en gaver ces intellectuels crétins et prétentieux qui ne daigneraient jamais jeter un regard sur sa pauvre vie.

-

L'ouverture se fit sur un coup de feu tiré en solitaire au bout de la rue où il vivait. Un homme s'écroula dans un silence quasi-parfait, une voiture détala une seconde plus tard avec un crissement sonore de pneus. Il ne connaissait ni la victime, ni l'agresseur. Il n'apprit qu'un temps plus tard que le crime avait été l'affaire de la mafia.

Il remonta le long de l'avenue jusqu'aux pieds du mort et s'y accroupit, ses grands yeux fixés comme en transe sur la peau crayeuse qui se durcissait à vue d'oeil. Le bras gauche du cadavre était tordu en parallèle avec sa tête à la manière d'un acteur esquissant un dernier salut à son public, et sur son front, un trou maquillé de rouge y béait.

En cet instant suspendu à regarder le sang s'égoutter au sol, il se sentit empli d'une envie innommable, d'un sentiment trop complexe pour être appréhendé par l'enfant qu'il était. Il y avait une extase au creux du ventre, une impression d'être face à la vie comme jamais il ne l'avait été auparavant. Il trempa ses doigts dans la flaque rouge, ses lèvres s'étirant lentement en un sourire craquelé.
Quelque part au loin, une femme hurla.

L'entracte s'abattit sur l'arrière d'un club avec un grondement de tonnerre et un rideau de pluie aveuglant. Il sortit du bar danseuses dans lequel il s'était illégalement faufilé par la porte de derrière, débouchant sur une étroite ruelle comme on en faisait peu hors des films d'horreur. La nuit était tombée et on ne voyait pas grand chose devant soi à cause de toute l'eau qui tombait du ciel. Une lueur vacillante brillait dans le rectangle lointain qui signalait la fin de la ruelle, les deux murs l'encadrant en hauteur et en noirceur à la manière de terribles géants de pierres.

Il n'avait pas peur; il n'avait jamais peur des monstres dans le placard. (Il savait intimement qu'il était proche d'en être un.)

Il était soûl et excité, échauffé par l'armadas de seins gonflés, de fesses rondes et de cuisses ouvertes qui lui tournaient à l'arrière des yeux. Il buta contre une benne à ordure, jura dans le vide en se tenant le pied.

Au travers des gouttelettes, il aperçut un bras ruisselant contre le sol, une main aux ongles peints ouverte comme pour réclamer une offrande. Et rattaché au bras, le corps inerte d'une jeune femme.
Sa peau hâlée était parsemée de trainée bleues et noires, sa mâchoire décrochée en un cri grotesque, et sur son cou, deux mains fantôme serraient toujours. Elle était probablement une prostituée, tabassée pour une mauvaise pipe peut-être, étranglée parce que le type n'arrivait pas à bander.

Il tomba à genoux face à la morte. La pluie couvrait ses joues de larmes; il eut l'air à cet instant d'un amant en deuil, silhouette accroupie, la tête renversée, au creux d'une ruelle solitaire.
Il se sentait proche du divin. Il ne lui restait qu'à achever le tableau.
Le sourire aux lèvres, un sourire extasié et tordu, il descendit lentement une main sur sa braguette.

La clôture se déroula sur une mélodie qu'il composa personnellement:
Bang, bang, bang, trois petits tours et puis son père s'en fut.

-

Il était trois heures passées et l'endroit se trouvait presque désert. Une faible lumière orangée provenait de quelques ampoules mourantes suspendues au plafond et seul le bruit régulier de ses poings frappant dans un sac de sable tranchait avec le calme de la place.

Elle l'observait sans rien dire, les bras croisés sur le cordon bleu qui entourait la plateforme de combat. Elle avait des yeux noirs courbés comme la griffe d'un félin, des doigts qui semblaient avoir trempés dans le sang. Au creux de son regard brillait une lueur qu'il connaissait bien: celle des cris, de la souffrance et des os qui craquaient.
(Il sourit, s'essuya le visage avec une serviette et lança: "Salut, moi c'est Nolan et toi?" )

-

Si la vie était une loterie, alors Lê Thu Pham était le gros lot de son existence, le seul jeu parfait que Dieu lui avait tiré.

Elle était la Faucheuse envoyée sur Terre pour le guider de ses mains mortelles.

-

Des taches colorées parsemaient sa vision et le son des exclamations de la foule lui bourdonnait dans les oreilles comme une incessante ruche de saletés, d'injures et de hurlements. Il décolla son visage du sol, les yeux noyés dans le rouge écarlate du mat, des cheveux dégoulinant de sueur lui tombant sur le front. Son épaule droite l'élançait désagréablement, mais il n'y prêta pas attention.

Il se releva et il avait le corps auréolé d'une violente lumière, le visage plongé dans l'ombre comme une rock star s'élevant pour cracher les premières notes dans son micro.

Il se releva et son sourire était celui d'un cannibale, les lèvres maculées de sang, son protège-dents brillant écarlate comme un bout de peau qu'il aurait arraché.

Il se releva et la foule hurla comme face à son Messie.
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